En marge de la 8ème édition de l’Alternative Mining Indaba , il s’est tenu en date du 03 Octobre 2024 à Kampy ya Boma à Kolwezi , la première session du dialogue citoyen Citoyen sur la maximisation des recettes minières. Un cadre d’échange, organisé par le Centre Carter avec l’appui de la coopération allemande et supervisé par le Ministère des finances via via le COREF , qui réunit les acteurs sociaux et les agences de l’administration fiscale de la RDC autour des questions de canalisation de paiement des flux en vue de maximiser les recettes issues du secteur minier.
Contextualisant le dialogue dont il est question, Me Fabien Mayani Directeur du programme gouvernance et ressources extractives du Centre Carter a expliqué que le dialogue citoyen rentre dans le cadre des missions du Centre Carter de promouvoir la transparence et la responsabilité afin que l’exploitation des ressources extractives participe au développement durable des populations. Les écarts énormes entre les revenus dus à l’Etat Congolais et ceux réellement perçus sont la motivation première de ce dialogue. « Dans le cadre des analyses fiscales, la RDC a perdu au moins 5 Milliards $ sur 7 projets miniers entre 2012 et 2022, soit une moyenne de 500 millions de $ par an » A-t-il révélé.
Et d’ajouter
« Les pratiques de fraude, d’optimisation et d’évasion fiscale dans toutes les phases de développement des projets miniers ainsi que les défis de coordination et de capacités des administrations minière et fiscale impliquées dans la collecte des recettes minières » A-t-il dit.
Le dialogue Citoyen n’est que la concrétisation de l’un des objectifs du Centre Carter qui est de soutenir la participation citoyenne dans la gestion des ressources extractives. A-t-il renchéri
Regard critique du régime fiscal de la RDC
Avant de laisser la place aux acteurs sociaux recrutés pour faire des recherches sur les flux de paiement afin d’engager les discussions avec les agents de l’administration fiscale Congolaise, Monsieur Baby Matabishi Coordonnateur du programme économique et de l’ITIE au Centre Carter a présenté une analyse critique du régime fiscal de la RDC. D’après l’analyse présentée par Mr Baby Matbishi la complexité du régime fiscal de la RDC présente plusieurs défis notamment à propos du paiement où en plus des flux fiscaux et parafiscaux, il y a également existence des flux illicites ; les circuits de collecte des recettes minières, la coordination au niveau de l’administration fiscale et la gouvernance et la redevabilité. L’analyse de l’économiste a également révélé que le régime fiscal Congolais ne dispose pas d’un modèle économique et fiscal adapté au contexte de son secteur minier, l’autorité de revenus est anarchique , la coordination des informations entre les services est très faible , le système déclaratif peine faute de gouvernance , le défis de capacités des administrations minière et fiscale impliquées dans la collecte des recettes minières. « L’administration fiscale compte à ce jour 40 000 agents » Indique l’analyse.
Principaux flux spécifiques examinés
Les acteurs sociaux regroupés en 3 pools ; Lubumbashi, Kolwezi et Kinshasa ont fait des recherches sur les différents principaux flux du secteur minier Congolais. De ces flux, 3 ont fait l’objet des échanges entre acteurs sociaux et les agents de l’administration fiscale pour cette première session du dialogue citoyen.
Les avis de mises en recouvrement (AMR)
Le pool de Kinshasa a fait une présentation sur les avis de mise en recouvrement (AMR) qui génèrent d’importants revenus à la République mais dont la nature demeure inconnue dans la catégorie des impôts moins encore des taxes. Le rapport ITIE 2020-2021 révèle que les AMR génèrent 350 à 450 Millions au trésor. Des montants interpellateurs car présentant des risques de manque à gagner à l’Etat faute d’un modèle approprié pour encadrer le régime fiscal et le fonctionnement du système fiscal en vigueur. Au regard des défis ci-haut énumérés, les acteurs sociaux et les agents de l’administration fiscale pensent qu’il y a urgence d’une loi contraignante qui pousse les entreprises à déclarer dans le délai indiqué afin de s’acquitter de leurs devoirs tel que le veut la loi, la législation congolaise doit s’adapter à la technologie, que l’Etat augmente le taux de pénalités fixées pour le paiement de l’AMR à 18 ou 20% pour décourager les entreprises qui ont fait du paiement des AMR une aubaine de réinvestissement et aussi qu’il fasse des paliers. Des montants faibles à recouvrer, on applique un taux faible. Et des montants élevés, on applique un taux élevé.
La quotité de 14% (15%) dus aux ETD
De son côté, le pool de kOLWEZI a abordé la question de 14% de la redevance minière due aux entités territoriales décentralisées. Ce paiement ad valorem qui frappe la valeur des minerais lors de sa vente ou de son exportation présente beaucoup des défis dans sa quotité réservée aux ETD. Ces dernières rencontres d’énormes difficultés dans la collecte du maximum des fonds qui leur sont dus suite à la non-maitrise de la quantité réelle produite par les entreprises qui ont la latitude de déclarer seules sans vérification. Pour la quotité de 15% en 2020, la province du Lualaba n’a perçu que 66.623.565.69 $ sur les 136.887.920,69$ attendus. Plusieurs problèmes expliquent ce genre d’écarts à répétition : La remise en question de la compétence des acteurs des ETD par les entreprises minières qui ne préfèrent que déclarer auprès des régies financières qui à leur tour remettent la note de débit aux agents des ETD sans pour autant que ces derniers procèdent à la vérification. Du point de vue administratif, le manque de régie financière par les ETD contraint ces dernières à se soumettre aux exigences de l’administration des mines qui met parfois un temps plus long que prévu dans le circuit que doit suivre la note établie, l’accès aux listes réelles de déclaration
. A ces problèmes, il faut ajouter la subtilité politique qui s’invite autant dans le travail de l’huissier fiscal que la signature des contrats qui se fait parfois sans intéresser les ETD.
Pour permettre aux ETD de faire leur tâche de manière libre et indépendante, les acteurs sociaux et les agents de l’administration fiscale proposent la création par les ETD de leur propre régie financière, la nomination des animateurs de cette régie financière, le renforcement des capacités des agents commis à l’administration de ladite régie , la création d’un cadre d’échanges entre les régies financières en vue de partager les informations nécessaires
Le droit est taxe à l’exportation (DTE)
Pour sa part, le pool de Lubumbashi qui a abordé la question des droits et taxe à l’exportation (DTE) a indiqué que la DGDA a perçu 261.102.455,68$ au titre de droit et taxe à l’exportation pendant la période de 2020- 2021. Ce paiement très significatif et important payé par les entreprises extractives à l’occasion de l’exportation représente une source de revenus non négligeables pour l’Etat Congolais. Cependant, il présente plusieurs défis dans Sa collecte à savoir la maitrise limitée de statistiques des produits miniers à exporter ; les limites du système déclaratif Congolais, l’expertise limitée des services d’assiette et de recouvrement, les faibles moyens des services étatiques, le non accès aux listes déclaratives des expatriés, l’absence de coordination d’informations entre les services, la création des services illicites et parallèles surtout le long de la nationale N°1 occasionnant ainsi des risques de corruption, de la fraude douanière et un manque à gagner. Signalons que la RDC est déficit sur les conventions fiscales. Les acteurs sociaux et les agents de l’administration fiscale recommandent la suppression des bureaux illicites, la création d’un cadre de discussions entre régies pour le partage des informations, l’informatisation du système fiscal et de douane congolais et la formation des agents de l’administration fiscale
Rappelons que la RDC a un système fiscal déclaratif et son régime est inclusif et exhaustif.
Flore KAYALA MUKALA